mercredi 20 novembre 2013

Les Enfants de la Terre - 1


On m'a parlé des Enfants de la Terre il y a bien longtemps, et j'ai mis du temps à acheter le premier tome. À l'époque, lassée de l'anglais en tant qu'outil de travail, j'avais pour projet de me remettre à lire en anglais pour le plaisir mais, par peur de la difficulté ou par fainéantise, je remettais toujours à plus tard l'achat de livres dans la langue de Shakespeare. J'ai fini par me décider à passer commande des deux premiers tomes, il y a 5 ans de cela.

Les Enfants de la Terre est une saga en 6 volumes, écrite par une romancière américaine répondant au nom de Jean Marie Auel. La dame est née en 1936 et est toujours en vie à l'heure actuelle. Elle a publié le premier roman de la série en 1980 et le dernier en 2011. Une écriture étalée sur plus de 30 ans, ça n'est pas très commun :-)




Les six volumes sont parus dans l'ordre suivant :


1. Le clan de l'ours des cavernes (The Clan of the Cave Bear)

2. La vallée des chevaux (The Valley of Horses)

3. Les chasseurs de mammouths (The Mammoth Hunters)

4. Le grand voyage (The Plains of Passage)

5. Les refuges de pierre (The Shelters of Stone)

6. Le pays des grottes sacrées (The Land of Painted Caves)




La particularité de la saga est de se dérouler à l'ère glaciaire et d'avoir pour héroïne une femme appartenant à l'espèce des Cro-Magnon, cotoyant d'autre personnages néandertaliens. Quand j'ai commandé les premiers tomes, je ne savais pas trop à quoi m'attendre. Une chose est sûre, toutes mes hypothèses de scénarios et de mises en scène possibles sont tombées à l'eau dès les premières pages lues.

Aujourd'hui, je vais vous parler des trois premiers tomes et ferai un autre billet plus tard sur les trois derniers de la saga. D'une part, je pense que ce serait trop indigeste de présenter les 6 volumes en un seul billet, et d'autre part, il faut bien que je fasse durer le suspense, n'est-ce pas ? :-)

Les deux premiers tomes sont à la fois très différents et très complémentaires, mon préféré restant, de loin, le tome II, La vallée des chevaux, parmi les six : il est tout simplement magnifique !
Le troisième tome est aussi très bon : c'est la continuité du deuxième.
En revanche, le quatrième est d'une qualité nettement inférieure, tout comme les deux derniers. 




1. Le clan de l'ours des cavernes - The Clan of the Cave Bear

L'histoire se déroule donc à la Préhistoire, plus précisément 30 000 ans avant notre ère, en pleine période glaciaire (brrrr !). Ayla, une petite fille de 5 ans, se retrouve orpheline et seule à la suite d'un tremblement de terre. Recueillie par un clan qui lui est étranger, elle grandit à leurs côtés, non sans difficulté, les membres du clan ayant remarqué chez elle les traits caractéristiques d'une espèce différente de la leur. En effet, Ayla fait partie de l'espèce Cro-Magnon, tandis que sa tribu d'adoption est néandertalienne. (Wikipédia)

Ce que j'ai aimé, c'est d'être projetée dans un univers que l'on sait être ancien, et qui est cependant complètement nouveau pour le lecteur, de par l'originalité du décor et de l'époque, tout en mettant en scène des problématiques si proches de nous. Les personnages sont des chasseurs-cueilleurs qui vivent tous dans la même caverne, divisée en foyers, séparés matériellement par de simples pierres posées au sol. L'auteur dresse le portrait d'une société patriarcale, vénérant Ursus, l'ours des cavernes.
Dans cette société, hommes et femmes ne possèdent pas les mêmes « souvenirs » (memories en anglais), qu'on pourrait apparenter à l'instinct. 



Les hommes chassent, ce que les femmes n'ont pas le droit de faire.
Le sorcier (qui célèbre les rituels rythmant la vie du clan) ainsi que le chef du clan, sont toujours des hommes.

Les femmes ne chassent pas, mais savent reconnaître les plantes et leurs vertus. 
Les guérisseuses sont toujours des femmes.

Ayla est recueillie par Iza, la guérisseuse du clan, et Creb, son sorcier.  

Tous les membres du clan possèdent un totem (le nom d'un animal, un peu comme nos signes astrologiques...), qui le définit et le protège.


Je ne veux pas vous raconter l'histoire pour ne pas vous gâcher le plaisir de la lecture, si jamais cette série vous tentait. Je dirais donc simplement que, de ce volume-ci en particulier, se dégage une atmosphère assez sombre et oppressante par rapport aux volumes suivants, car les personnages parlent très peu (ils utilisent en fait un langage essentiellement composé de signes faits avec les mains). De plus, il s'agit d'une société très rigide, où Ayla, qui y est étrangère, a du mal à trouver sa place. À la fin du roman, suite à de nombreuses altercations et épisodes particulièrement douloureux (avec Broud, le fils de Brun, le chef du clan), celle-ci est d'ailleurs contrainte de quitter le clan définitivement.



2. La vallée des chevaux - The Valley of Horses

Ce deuxième volume raconte la vie d'Ayla, partie à la recherche de sa propre espèce, surnommée « Les Autres » par les membres du clan. Pendant la moitié du livre, elle voyage seule vers le nord, espérant rencontrer quelques uns de ses semblables. Au bout de plusieurs mois de marche, désespérant de trouver ceux qu'elle cherche, elle s'installe dans une petite grotte, dans une vallée peuplée de chevaux sauvages (les animaux n'étaient pas encore domestiqués à l'époque).
Se sentant bien seule, elle en vient à domestiquer une jeune pouliche recueillie après avoir tué sa mère lors d'une chasse, puis un lionceau, qui deviendront ses compagnons et l'aideront à chasser.
Lors d'une séance de chasse, elle tombe sur deux hommes appartenant à son espèce. L'un est tué, tandis qu'elle parvient à sauver l'autre, Jondalar.



Le passage de la convalescence du jeune homme, préludant de la rencontre amoureuse avec Ayla, est amené avec maestria par l'auteur depuis le début du livre. En effet, ce roman se distingue du précédent par sa construction alternant un chapitre sur l'histoire d'Ayla avec un chapitre sur les déplacements de Jondalar, jusqu'au moment de leur rencontre (environ au milieu du roman). Jondalar est un homme de Cro-Magnon, faisant partie de la tribu des Zelandoni, dont le lieu de sédentarisation correspond plus ou moins au Sud-Ouest de la France. Au début du livre, il quitte sa famille et sa tribu pour entreprendre un Voyage, au cours duquel il rencontre d'autres tribus amies composées d'hommes de Cro-Magnon.

La société dont est issue Jondalar est radicalement opposée à celle du Clan, où a vécu Ayla pendant son enfance et ses premières années en tant que femme. C'est précisément de ces différences que se nourrit la rencontre de ces deux êtres solitaires.


Les Zelandoni vouent un culte à la Déesse mère, appelée Doni dans la saga. Les femmes, qui jouent un rôle prépondérant dans leur société, sont considérées comme sacrées par les hommes, car c'est elles qui donnent naissance aux enfants.
Les hommes de Cro-Magnon possèdent un langage articulé, qui diffère d'une tribu à l'autre, ainsi que des arts évolués (musique, chant, peinture, sculpture, etc.). Les membres du Clan connaissent également la musique et la danse, mais l'auteur insiste sur leur forme primitive par rapport à celle des « Autres ».

La rencontre entre ces deux sociétés, réduite à l'échelle d'un homme et d'une femme, est fabuleusement mise en scène par Jean M. Auel. Rien que pour ce passage, je vous conseille de lire ne seraient-ce que les deux premiers tomes. Le premier pour vous imprégner du monde d'Ayla, et le deuxième pour la beauté de la rencontre de ces deux êtres, chacun si seul à sa propre manière.

La façon dont Ayla réapprend à parler, notamment, est extrêmement émouvante. J'ai eu plus d'une fois la larme à l'œil :-)





3. Les chasseurs de mammouths - The Mammoth Hunters


À la fin du tome II, Ayla décide d'accompagner Jondalar dans son Voyage. Le couple part donc à l'aventure et, dans le tome III, rencontre une autre tribu Cro-Magnon, les Mamutoï, un peuple chasseur de mammouths.
Au cours de cet opus, diverses péripéties se produisent, dont l'adoption d'Ayla par les Mamutoï, l'éveil d'Ayla à la spiritualité par le chamane de cette tribu, Mamut, sans oublier l'attraction que ressent Ayla pour Ranec, un métis sculpteur d'ivoire appartenant à la tribu.

Dans ce troisième volume, le thème du racisme est par ailleurs très présent. On avait déjà appris dans le tome précédent que les « Têtes Plates » (flatheads en anglais), nom donné aux néandertaliens (le clan ayant recueilli Ayla étant petite fille) par les tribus Cro-Magnon, sont considérés comme des animaux et non comme des hommes à part entière (en particulier parce qu'ils ne possèdent pas de langage articulé). Ce dénigrement, souligné à maintes reprises par l'auteur, est la source de malentendus d'abord entre Ayla et Jondalar, puis de conflits à divers degrés avec les membres des tribus qu'ils rencontrent. Jondalar lui-même éprouve d'abord de la honte pour le passé d'Ayla, puis de la gêne quand elle l'explique aux autres Cro-Magnon.

Tout au long des trois tomes (et du reste de la série), Ayla a maintes fois l'occasion de prouver ses talents de guérisseuse appris de sa mère de substitution, Iza, une Tête Plate, ce qui lui permet de tenir tête à ces accusations difficiles à supporter.




J'ai aujourd'hui volontairement souligné les aspects positifs des Enfants de la Terre. Mon prochain billet sur cette saga vous détaillera ce que je n'ai pas aimé (car il y a aussi des choses mal amenées, malvenues ou sans intérêt !), avant de vous parler des trois derniers tomes de la série.

Suspense, suspense :-)

Au fait, connaissiez-vous Les Enfants de la Terre






Suite de mes impressions sur Les Enfants de la Terre




2 commentaires:

  1. Très original comme sujet.
    Ce qui m'a tout de suite interpellée en lisant les premières lignes de ton post, c'est le traitement stylistique des romans, à savoir, comment faire pour transcrire la parole de l'espèce des Cro-Magnon, leurs sentiments, leurs pensées... ? (quel défi!) ^^

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  2. En fait, c'est les hommes de Néandertal (le Clan, dans le roman), qui ne possèdent pas de langage articulé. Les Cro-Magnon, eux parlent "comme nous". Au travers des noms existants au sein des différentes tribus, il transparaît d'ailleurs une volonté de l'auteur de "coller" à l'histoire des langues indo-européennes, car les sonorités utilisées diffèrent suivant que la tribu vit dans l'actuel Sud-Ouest de la France ou autour de la mer de Crimée, par exemple. Elle a fait un travail remarquable de ce côté-là :-)

    Pour les hommes de Néandertal, ceux que l'on voit essentiellement dans le premier tome et qui ont recueilli Ayla (alors qu'elle ne fait pas partie de leur espèce), ils communiquent entre eux par gestes. Ils possèdent un langage articulé très basique, qui se limite presque uniquement à la prononciation des noms des personnes. Tout le reste est exprimé par gestes faits avec les mains ou les bras. C'est très intéressant.

    Il y a un passage au début du livre où Ayla, qui a 5 ans quand elle est recueillie par ce peuple et sait déjà parler, parce qu'elle est née Cro-Magnon, n'arrive pas à se faire comprendre (au début, on pense que c'est la barrière de la langue), ni à comprendre ce qu'Iza et Creb lui disent. Car elles ne VOIT pas les signes qu'ils échangent entre eux. Un jour, ça fait "tilt", et elle peut enfin communiquer avec eux.

    Le même problème est évoqué dans le tome II lors de la rencontre d'Ayla et de Jondalar. À ce stade, Ayla a complètement oublié le langage articulé qu'elle avant appris avant ses 5 ans et ne comprend par ce que Jondlar lui dit. Lui, comme elle plus jeune, ne voit pas non plus les gestes qu'elle effectue pour essayer de communiquer avec lui.

    Comment repérer un langage si on ne possède pas les clés pour en reconnaître les unités de sens ? Vaste question !

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